Urgences : générique de fin ?

 


 


   Les Urgences de Bagnères sont en danger. Une fermeture du service la nuit a été évoquée pour les mois d’été. Aucune garantie pour la suite. Si le service de nuit disparaît, on peut craindre à court terme une fermeture totale.

Les conséquences seraient multiples :

   - dans une vallée enclavée comme la nôtre, ajouter 20 km, donc environ autant de minutes avant d’être pris en charge sur un problème engageant le pronostic vital provoquerait des décès ou entraînerait des conséquences irréversibles pour certains ; le service tarbais, déjà saturé (entre 4 et 6 h d’attente en moyenne actuellement !), aurait bien du mal à faire face à un afflux supplémentaire ;

   - dans une vallée où l’on attend un nombre important de touristes cet été (sans parler des curistes et des skieurs ensuite), supprimer les urgences la nuit mettrait forcément en danger certains d’entre eux ; un point très négatif en termes de qualité d’accueil ;

   - les urgences font travailler les services médecine, radiologie et éveil de l’hôpital ; moins d’entrées signifierait pour eux fragilisation, et probablement fermeture à terme.

   - en cas de fermeture des urgences de nuit, le SMUR de Tarbes devrait couvrir notre secteur géographique en plus du sien, déjà très étendu ; ses interventions perdraient donc forcément beaucoup en efficacité, le temps étant un facteur primordial dans la prise en charge de beaucoup de patients.

 

   Pour justifier une fermeture, personne n’évoque des difficultés de financement. Il serait plutôt question de déficit médical : nous manquons cruellement en France de médecins urgentistes, alors que, paradoxalement, les services d’urgence sont de plus en plus sollicités et souvent saturés, conséquence de la diminution du nombre de médecins de ville. La médecine urgentiste devient de moins en moins attractive, compte tenu de la charge de travail qu’elle induit. De plus en plus d’urgences, de moins en moins d’urgentistes… Malheureusement rien n’est fait pour remédier à cela, et ce problème sera récurrent dans les années qui viennent.

   Ne reste plus qu’à gérer la pénurie. A Bagnères, les trente urgentistes qui se relaient à raison de 24 heures de garde par mois viennent de Tarbes. Six équivalents temps plein manquent à l’appel dans cette ville. On comprend que son service d’urgence, en difficulté, souhaite récupérer quelques heures, faute de pouvoir recruter. Mais en quoi serait-il efficace de déshabiller les uns pour habiller les autres, le nombre global d’interventions restant le même ?

 

   La solution, pour Bagnères, risque de passer par une intervention politique au plus haut niveau. Notre cher Président a quelques attaches ici, et pourrait se montrer sensible à notre désarroi… Mais, même si son intervention – hypothétique pour l’instant – résout le problème conjoncturel bagnérais, cela ne sera que le fait du prince, et n’améliorera en rien la situation globale du département, ou a fortiori du pays. Lorsque la pandémie a mis en évidence la grande misère hospitalière, le gouvernement nous a abreuvés de belles paroles, mais elles se sont avérées en contradiction avec les actes qui ont suivi. La politique de suppression de lits et de « rationalisation » comptable a continué de s’appliquer, comme si l’hôpital public devait se gérer à la façon d’une entreprise privée. Quant au problème de déficit médical, il n’empêche visiblement pas de dormir ceux qui nous gouvernent, bien loin des problèmes terre à terre de la plèbe. Rendre attractif le métier d’urgentiste en donnant les moyens nécessaires aux services d’urgence ne serait pourtant pas très compliqué.

   Le monde d’après n’a rien à envier au monde d’avant, même dans le domaine de la santé, pourtant si éprouvé depuis un an et demi. Indépendamment de la crise sanitaire, chacun peut constater combien il devient difficile de se soigner. L’offre de soins se raréfie en dehors des métropoles, des mois d’attente sont nécessaires pour avoir rendez-vous chez un spécialiste. Jusqu’où devra aller la dégradation de notre service public pour que nous réagissions vraiment ?

 

 

 

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