Aqua bon !

 


 

   Avec le réchauffement climatique, dont les effets se font maintenant sentir de façon spectaculaire, l’eau est appelée, dans les années qui viennent, à devenir le bien le plus précieux de l’humanité. L’eau potable, entendons-nous bien, pas l’eau de mer gorgée de micro-plastiques qui va en plus grignoter nos côtes ou l’eau polluée des rivières et de beaucoup de nappes phréatiques.

   Nous pensions, en France, avoir le privilège de consommer une eau abondante et irréprochable. Il a fallu déchanter il y a quelques semaines, lorsque nous avons appris que 20% des Français étaient alimentés par une eau dépassant les seuils de qualité tolérés pour les pesticides et leurs métabolites. Autrement dit, douze millions de nos compatriotes ne devraient pas consommer leur eau du robinet… Merci à l’agriculture productiviste qui, non contente de détruire la biodiversité (insectes et oiseaux particulièrement), gorge nos sols d’une chimie qui s’infiltre dans les nappes sous-terraines et nous empoisonne. Merci également aux élevages intensifs dont les lisiers, transformés en nitrates, rendent l’eau encore plus dangereuse (sans parler de la prolifération d’algues qu’ils provoquent sur les plages en aval et de la souffrance animale induite par cette forme d’élevage).

   Les Hautes-Pyrénées ne sont pas épargnées par ce phénomène, particulièrement dans la partie nord du département où sévissent agriculture et élevage industriels. Comme dans le Gers, l’eau du robinet est souvent impropre à la consommation à certaines périodes de l’année, d’où la nécessité de la mélanger à de l’eau de bonne qualité pour diluer les métabolites et la rendre à peu près buvable…

   L’eau que nous consommons à Bagnères, par contre, est quasi exempte de résidus de pesticides et de nitrates, puisqu’il n’y a ni agriculture industrielle ni élevages intensifs en amont. Un bien inestimable actuellement, qui le sera plus encore dans le futur.

   Depuis plusieurs décennies, nous vendons une partie de cette eau à deux syndicats mixtes d’adduction d’eau potable (Tarbes-Sud et Adour-Coteaux), qui représentent un bassin d’environ 30.000 habitants.

   En 2019, le maire de Bagnères indiquait en conseil municipal que l’usine de Médous (où est captée et traitée l’eau en question depuis les années trente) nécessitait  « une mise aux normes de sécurité et sanitaire au coût estimé à 4,5 millions d’euros ».

   En septembre 2022, le projet définitif a été présenté à la presse. Il s’agit finalement de construire une nouvelle usine à côté de l’ancienne, pour un coût de 5 millions d’euros. La surprise du chef, c’est sa gestion ! Elle sera assurée par un nouveau syndicat regroupant Bagnères et la Communauté d’Agglomération Tarbes-Lourdes-Pyrénées (qui, elle, dispose de la compétence eau et assainissement). L’argent sera prêté au syndicat à taux zéro par l’agence Adour-Garonne. Aucune inquiétude : ce sont les usagers qui paieront indirectement les mensualités (l’eau augmentera de 15 % dans un premier temps !).

   Autrement dit, Bagnères vient de donner le double des clés du camion-citerne à Tarbes ! Nous perdons partiellement la maîtrise de notre si précieuse ressource en eau, au profit de l’acheteur de ce bien. Et que gagne Bagnères dans cette opération ? Rien, si ce n’est la présidence (temporaire ?) du syndicat. Tout est perdu, fors l’honneur ! Bien joué, Monsieur Trémège.

   Notre maire n’aime pas la Communauté de Communes de Haute-Bigorre, car elle est présidée par un autre que lui. Déjà en 2019, il lui a refusé le transfert de la compétence eau et assainissement. Ensuite, après les élections de 2020 qui rebattaient pourtant les cartes, il n’a pu obtenir la présidence de cette institution (et a même perdu plusieurs vice-présidences au profit de son opposition). Humiliation, ressentiment… Il laissait entendre qu’en représailles, il envisageait de se rapprocher de la communauté de Tarbes. C’est maintenant chose faite. Claude Cazabat règlerait-il ses différends personnels sur le dos des Bagnérais ? En tout cas, l’entendre exposer maladroitement le projet de Médous à côté d’un Gérard Trémège radieux était douloureux. Le loup et l’agneau version bigourdane.


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