La Chambre des dépités
Des élections au goût amer.
Bien sûr, il est
possible de considérer le verre à moitié plein, en appréciant la petite
Bérézina vécue par ce Président omnipotent dont le quinquennat finissant laisse
le pays dans un état désolant.
Emmanuel Macron a largement aggravé les inégalités, avec
la suppression de l’impôt sur la fortune et le plafonnement – parfois même la
diminution – des minima sociaux, des allocations logement, du SMIC et des
retraites (avec en point d’orgue les patrons du CAC 40 qui ont vu leur revenu
augmenter de 100% en 2021, tandis que le revenu moyen de leurs salariés et des
Français en général stagnait).
Il a maltraité les enjeux climatiques, en ignorant la
plupart des conclusions de
Il a proposé une réforme des retraites injuste, qui a
jeté des millions de gens dans les rues avant d’être piteusement abandonnée.
Il a accru le désinvestissement de l’État dans les
services publics, avec pour conséquences un hôpital public fermant ses lits à
tour de bras et épuisant son personnel, des territoires progressivement privés
de l’essentiel, une population paupérisée n’ayant d’autre recours pour se faire
entendre qu’occuper pendant des mois les ronds-points.
Son seul mérite aura été d’abandonner temporairement les
canons néolibéraux pour remettre à l’ordre du jour le côté protecteur de l’État,
durant le moment « quoi qu’il en coûte ». Le soutien apporté aux
différents acteurs économiques pendant la pandémie aura évité beaucoup de
drames. Mais cela n’aura été qu’une parenthèse, il ne se parlait plus ces
derniers temps que réduction de déficits, et le Président entendait réactiver
une réforme des retraites allant uniquement dans ce sens.
Seulement, le
roi est nu maintenant, il devra négocier chaque projet de loi pied à pied avec
le Parlement, qui retrouvera un rôle essentiel dans notre démocratie.
Quant à
notre député sortant, l’indéniable
capital de sympathie dont il dispose auprès d’une partie de la population n’a
pas suffi à faire accepter le bilan désastreux de son mentor. Bagnères a renoué
avec un vote majoritairement à gauche, comme souvent lors de scrutins
nationaux.
On peut voir
également, hélas, le verre à moitié vide, en constatant que nous venons de
laisser passer l’opportunité historique de prendre à bras le corps les
problèmes du pays et indirectement de la planète.
Le pari de
Le Président risque de gouverner tranquillement avec la
droite, qui jouera peut-être le jeu s'il met le prix en termes de postes
ministériels. Le néolibéralisme continuera alors d’être l’alpha et l’oméga de
la politique du gouvernement. La casse sociale s’accélèrera, les mesures de
lutte contre le réchauffement attendront des jours meilleurs (ou pires !).
Le Rassemblement national pourra tranquillement
capitaliser pendant cinq ans sur sa percée spectaculaire de dimanche, lui qui a
fait exploser le plafond de verre l'empêchant jusqu'à présent de devenir
majoritaire dans des scrutins nationaux. Le "barrage républicain" a
cédé, les gens de droite ont souvent préféré voter Rassemblement national que
NUPES. Inquiétant pour les présidentielles à venir puisque le terrain sera
dégagé pour l’extrême-droite. La faute aux Républicains, qui banalisent et
récupèrent ses idées. La faute aux socialistes, qui oublient depuis des
décennies l'existence des territoires et des banlieues, leurs difficultés
économiques et sociales, et qui, lorsqu'ils sont au pouvoir, contribuent à
leur tour à la disparition des services publics dans ces zones délaissées – qui
votent maintenant RN – et ne font rien de significatif pour réduire les
inégalités (cf. quinquennat de Hollande). La faute aux macronistes, qui ont
pris le relais avec une philosophie identique sinon plus caricaturale encore
(d’où l’émergence des Gilets jaunes), et qui osent maintenant mettre RN
et NUPES dans le même panier.
Mais bien sûr, si le président se trouve dans une
situation de blocage et donc dans l’incapacité de faire passer le moindre
projet de loi, il aura encore la possibilité de dissoudre l'Assemblée en
prenant la population à témoin du chaos prétendument généré par l'opposition.
Peut-être sera-t-il entendu par les partisans de l'ordre. Ils lui donneront
alors la majorité absolue qui lui manque tant actuellement pour retrouver ses
habits d'autocrate.
Une situation
instable donc pour notre nouvelle députée. Elle a sans aucun doute l’énergie et
la cohérence nécessaires pour assumer sa nouvelle tâche durant les cinq ans à
venir. Il reste qu’elle va faire son apprentissage d’élue de la nation dans des
conditions bien difficiles. On lui souhaite quand même le meilleur.
Pour conclure,
nous constatons avec amertume que nous venons de vivre deux épisodes électoraux
majeurs durant lesquels rien de ce qui touche à la survie de notre espèce –
réchauffement climatique, pollution généralisée, raréfaction des ressources,
multiplication des pandémies, développement du nucléaire etc. – n'aura été vraiment
débattu... Seule
Inquiétant,
non ?
Jean-Marc Aragnouet
« Bonnes gens, dormez en paix, rien ne vous
menace… »
La canicule n’est que
passagère
L’eau est abondante
La neige est éternelle
Les arbres ne souffrent pas
L’air est pur
Les animaux sont bien traités
Le vivant n’est pas menacé
Les ressources sont
inépuisables
Le nucléaire est rassurant
La guerre est une illusion…
« Citoyens, citoyennes, dormez
en paix rien ne vous menace… »
Les institutions sont solides
La presse est libre
Les caméras vous protègent
Les banques sont vertueuses
L' État est bienveillant
Les élus décident
L’hôpital n’est pas en péril
L’école est celle de toutes les chances
La retraite enfin se pointe à l’horizon
L’effondrement est une chimère…
« Amis terriens, amis
terriennes, rien ne vous menace… »
Les communautés sont fraternelles
La religion libère
Les vieux sont choyés
Les réseaux sont sociaux
Les jeunes ont un avenir
La culture triomphe
Les sociétés sont justes
La liberté règne
Le monde est sûr
Et l’homme est clairvoyant...
« Bonnes gens, dormez en paix,
rien ne vous
menace… Le guet veille.
Demain il fera jour, les soldes commencent et les
vacances approchent.
Faites
de beaux rêves. »
Erick Vuillier