Union, ou abstention !

 



   Le vingtième siècle a connu quelques drames planétaires, dont deux guerres mondiales. La seconde a fait naître, particulièrement en Europe du Nord et de l’Ouest, des Etats-providences. Efforts de solidarité entre classes sociales, instauration de systèmes de protection individuelle ou collective, recherche de justice sociale, en étaient les fondements. Des valeurs de gauche après des décennies de libéralisme économique de droite débouchant sur une crise économique majeure, cette dernière engendrant totalitarismes et guerre généralisée. La paix enfin revenue, l’aspiration à reconstruire un monde plus juste était puissante – elle s’exprimait par exemple en France à travers le programme du Conseil national de la Résistance. Mais ce n’est pas la seule explication à la création d’Etats protecteurs. La classe possédante acceptait de voir augmenter ses prélèvements fiscaux, d’octroyer de nouveaux droits et des salaires plus décents aux travailleurs non par idéalisme mais par réalisme : dans le monde bipolaire de la Guerre froide naissante, il fallait créer un contre-feu pour combattre l’attractivité du modèle socialiste (et faire oublier dans quelques cas une attitude peu "résistante" !).

   Il se disait à l’époque que le fond de l’air était rouge. Les choses ont bien changé depuis, la couleur a viré au bleu… Dans les années 80, sous l’impulsion de Reagan et Thatcher, la notion d’Etat-providence a été proclamée dépassée. Trente ans de progrès sociaux ont été progressivement mis à mal par le néolibéralisme triomphant, qui a imposé une mondialisation économique mettant en compétition les classes ouvrières de la planète entière.

   Quarante ans plus tard, le marasme est quasi-total. Seuls les géants du numérique et du luxe – et les riches actionnaires, bien sûr ! – se portent bien. La planète est fragilisée à l’extrême par la course au profit, qui induit une croissance sans fin de la production et de la consommation de biens. Les ressources s’épuisent, les déchets s’accumulent, la pollution se généralise, le climat change, les pandémies se multiplient. La dernière en date, d’une ampleur inégalée jusqu’ici, a d’ores et déjà provoqué une hausse exponentielle des inégalités et donc la précarisation et la paupérisation d’une partie importante de la population mondiale.

   Pourtant, malgré l’ampleur dramatique de la crise écologique et sociale, nous n’assistons toujours pas, contrairement à ce qui s’était passé durant l'après-guerre, à l’émergence d’un courant progressiste puissant ayant l’ambition de rendre notre monde plus juste… et de le conserver habitable, doit-on ajouter maintenant ! Un Conseil national de la Résistance au néolibéralisme n’a pas encore vu le jour en France. Les valeurs de droite – individualisme, compétition, nationalisme – restent dominantes. Le modèle socialiste des pays de l’Est a fait naufrage. En France, la gauche peine à se réinventer et à présenter un projet cohérent qui constituerait une alternative au libéralisme économique. Elle est éclatée en mille nuances. La pensée de droite peut donc écraser sans mal la concurrence. Le fond de l’air vire même peu à peu du bleu au bleu "Marine". Celle-ci est maintenant aux portes du pouvoir.

 

   Il y a urgence. Urgence à faire surgir une force sociale et écologiste puissante parce qu’unitaire. Urgence à unir sur un programme toutes les couleurs qui composent l'échiquier actuel de la gauche. Car en dehors de l’union, point de salut. Au niveau national, nous savons qu’en 2022 des candidatures multiples mèneront directement à l’élection d’une personne de droite (ou d’extrême-droite). On connaît par avance les conséquences… Nous sommes de plus en plus nombreux à penser que la seule solution pour imposer aux différents courants de gauche de s’entendre sur un candidat et un programme communs sera de faire savoir que, dans l’hypothèse où ces forces partiront en ordre dispersé, nous nous abstiendrons d’aller voter.

   Oui, s’il y a plusieurs candidats portant des valeurs sociales et écologistes, nous préfèrerons nous abstenir au premier tour plutôt que nous contenter de trancher entre les futurs vaincus. Peut-être savoir cela donnera-t-il à réfléchir aux candidats potentiels, assurés, dans l’hypothèse d’une abstention massive de leurs sympathisants, de faire un score microscopique.

   Cette pression ne pourra fonctionner que si nous sommes extrêmement nombreux à nous engager dans ce sens, et que nous le faisons savoir assez fort. Un appel national à signature devra être lancé, avec un slogan style  « UNION, OU ABSTENTION ! ». Alors nous pourrons nous compter et pousser pour une candidature unique, qui mettra au second plan les querelles d’ego, redonnera espoir à tous ceux qui ne se satisfont pas de la dispersion mortifère actuelle des forces novatrices et écologistes.

 

 

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