No cultur no futur

 


 

   « Ce virus ne réalise-t-il pas le rêve ultime des néolibéraux : chacun, confiné seul chez soi devant son écran, participant à la numérisation intégrale de la santé et de l’éducation, tandis que toute forme de vie sociale et d’agora démocratique était décrétée vecteur de contamination »

                                                       Barbara Stiegler. De la démocratie en pandémie

 

 

   Une mobilisation importante du milieu culturel haut-pyrénéen aura lieu ce week-end. A Bagnères, elle prendra la forme d’une marche d’un lieu culturel fermé à un autre, l’après-midi du samedi 20 mars (départ Salies 14h30), puis d’une boucle à vélo entre médiathèque et Alamzik le jour suivant (départ médiathèque14h).   

   L’appel a été lancé sur notre département par vingt-deux associations ou collectifs (Fraktal, Maynats, Traverse, Cartel Bigourdan et Osez le vélo pour la Haute-Bigorre). Cette mobilisation fait écho à l’occupation d’une soixantaine de lieux culturels (théâtres et opéras particulièrement) qui a démarré dans le pays il y a quinze jours.

   Le communiqué du collectif est un appel aux élus locaux et nationaux, mais aussi aux habitants et spectateurs, à faire entendre leur désir de culture. « La fermeture des salles, des théâtres, des cinémas, des salles des fêtes, l’arrêt pratiquement total de la vie associative plongent les populations dans un isolement desséchant, dans une impossibilité d’agir, dans l’incapacité de faire société et de mieux faire humanité ensemble. Il y a danger, dans une désespérance évidente, de faire le lit des démagogues. ». Le collectif demande la réouverture des lieux culturels au public, une prorogation des droits des intermittent.e.s, la mobilisation de crédits du plan de relance pour soutenir l’emploi du secteur de la culture et la suspension de tout projet de réforme des conditions d'accès à l'assurance chômage, dans un contexte de grande fragilisation des personnes en situation de précarité.

 

   On ne peut que se sentir solidaire de cet appel. D’abord parce que la culture est essentielle à notre vie en société. Et puis parce que plusieurs études récentes mettent en évidence que, lorsqu’on respecte des règles sanitaires strictes, les lieux de culture ne se transforment jamais en clusters. Des chercheurs allemands viennent de montrer que le taux de reproduction du virus (le nombre moyen d’individus qu’une personne porteuse peut contaminer) est de 0,5 dans les lieux culturels avec port du masque obligatoire et une jauge à 30%, alors qu’il est de 1 dans un supermarché ou un restaurant, de 1,5 dans un open-space ou un train et de 3 dans un établissement scolaire. Ce faible risque de contamination s’explique par le fait que le public parle peu dans une salle de spectacle. La projection de gouttelettes potentiellement infectieuses y est donc très limitée.

   Ouvrons donc les salles de spectacle et de cinéma, recréons un peu de lien autour de la culture. Contredisons notre président, qui sait ce qui est essentiel ou ne l’est pas pour la population. La culture ne représente probablement pas un part suffisante du PIB pour qu’il la déclare essentielle. L’économie, la production, la consommation, voilà pour lui les secteurs clés. On laisse les supermarchés ouverts, on permet aux gens de s’entasser dans le métro pour aller travailler, on laisse les écoles ouvertes pour que les parents puissent rester productifs. Les universités, par contre, sont quantité négligeable (l’élite se forme dans les grandes écoles), elles peuvent donc rester fermées, et tant pis pour la génération perdue qui aurait dû y faire ses premières armes. Les vieux, enfin, sont improductifs donc invisibles, mais il faut les protéger, car des hécatombes dans les EHPAD ne feraient pas bon effet. Alors, puisque l’état d’urgence sanitaire permet de restreindre les libertés publiques de façon arbitraire, en légiférant par ordonnances, donc hors de tout contrôle parlementaire, interdisons-leur de sortir de leurs structures et même d’y recevoir des visites. C’est inhumain, cela provoque aussi des hécatombes, mais personne ne s’en rend compte…

 

   Les jeunes, les vieux, les précaires et la culture sont les victimes directes de la pandémie. Notre démocratie et nos libertés sont des victimes collatérales. Mobilisons-nous pour défendre ce qui nous est cher.

 

 

 

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