On vit une époque formidable !

 


   « On vit une époque formidable ! » clamait Reiser dans Charlie Hebdo en 1978, époque où l'on pouvait encore se marrer et dessiner sans se faire assassiner... 

   2020 laissera des SRAS... crises sanitaire et économique, accélération des menaces sur la survie des espèces vivantes et sur la paix mondiale, retour du fanatisme religieux, des totalitarismes et des nationalismes agressifs. Un Moyen Âge post-moderne, avec peste covirale et croisades revisitées, ou une décennie façon années trente  avec crise économique et montée des régimes autoritaires, se profilent-ils ? Concoctons-nous un mix de 1984Soleil vert et Mad Max… avec intelligence artificielle et reconnaissance faciale en prime, sur une planète de plus en plus aride et dévastée ?

   Dans cette période compliquée et morose de confinement, nos gouvernants naviguent à vue. En dignes héritiers – et continuateurs sans état d’âme – de ce néolibéralisme qui a mis à genoux  en vingt ans le secteur hospitalier et beaucoup d’autres services publics, ils tentent fébrilement de trouver le traitement miracle qui sauvera conjointement la santé publique et l'économie.

   Mais les modalités de prise de décision de notre Ve République montrent une fois de plus leurs limites, avec un président omnipotent, un gouvernement aux ordres, un Parlement méprisé et une bureaucratie énarchisée toute puissante déconnectée de la réalité... S'ensuivent des injonctions contradictoires ou carrément punitives. Masques inutiles un jour, obligatoires le lendemain. Droit d’aller en forêt ou sur les plages, mais dans un rayon d’un kilomètre du domicile, et pour une heure seulement. Tabac, carrelage et supermarchés : OK. Chaussettes, livres et petits commerces : niet. Kafka n'est pas mort... Comment adhérer à cet arbitraire administratif et se sentir bien dans cette France" terre de liberté" en théorie mais seul pays au monde où les citoyens remplissent des déclarations sur l’honneur pour prouver qu’ils respectent la loi ? 

   Etre infantilisé donne envie de se comporter comme un enfant… Faisons confiance aux citoyens, qui ont déjà fait preuve de beaucoup de sens civique en acceptant de restreindre drastiquement leur liberté de déplacement. Dans une situation sanitaire et économique critique partie pour durer plusieurs mois, impliquons-les dans les décisions futures, et finissons-en avec l’opacité décisionnelle actuelle.

   Camille Landais, membre du Conseil d’analyse économique rattaché à Matignon, explique dans le journal Le Monde du 3 novembre : Nous avons aujourd’hui un arsenal de mesures dont on connaît, plus ou moins, les effets sur la diffusion de l’épidémie : fermer les bars, réduire les réunions de famille, fermer les écoles, les lieux de travail, limiter les déplacements. Mais que connaît-on de leur coût sociétal ? A peu près rien ! Les Français préfèrent-ils fêter Noël en famille ou continuer à travailler et à se déplacer normalement ? Pour le savoir, il faudrait associer de façon plus étroite la population, créer un contenu démocratique aux prises de décisions. Il est impossible d’aller ainsi d’état d’urgence en état d’urgence, sans concertation. Il propose la création d’un Comité de citoyens tirés au sort, en liaison avec le Comité scientifique pour déterminer les mesures à prendre en fonction de l’évolution de la situation, sur le plan sanitaire comme sur le plan économique.

   Il est vital aussi, selon nous, d’associer aux décisions futures les élus locaux, les représentants d’association et les citoyens lors de concertations décentralisées. Notre avenir commun en dépend. Cette brise démocratique pourrait souffler les vilains nuages qui se profilent et assainir l’atmosphère étouffante actuelle crée par l'acceptation passive ou à l'opposé par la contestation sourde de l’arbitraire technocratique.

   Sacré Reiser, tu nous manques. Ton album posthume  «Vive le confinement » nous ferait le plus grand bien...

 

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