Qui pour présider la CCHB ?



   Notre pays a une tradition jacobine bien ancrée. Il a fallu attendre les années 80 pour parler décentralisation, mais l’espace accordé aux collectivités reste limité. Elles sont en liberté surveillée, sous le regard paternaliste de l’Etat et de ses représentants locaux, les préfets.

   La constitution de 1958 donne des pouvoirs presque sans limites au président, en réduisant le rôle du parlement à celui d’une chambre d’enregistrement, et en faisant du Premier ministre un simple exécutant révocable. Ce sur-mesure a été créé pour Charles de Gaulle, dans un moment difficile pour notre pays, quand les gouvernements successifs de la IVe République s’efforçaient en vain de freiner les aspirations légitimes à l’indépendance de nos colonies. La guerre d’Algérie s’est terminée en 1962, mais l’homme « providentiel » est resté et sa constitution aussi.

   Les présidents, ensuite, se sont succédés dans des circonstances moins dramatiques. Beaucoup ont parlé de la nécessité de rééquilibrer les pouvoirs législatif et exécutif, mais rien n’a été fait. Quelle que soit la couleur politique du locataire de l’Elysée, force est de constater qu’il se glisse très vite – et avec délice – dans ce costume de président tout puissant, n’ayant de comptes à rendre qu’à son électorat tous les cinq ans. Certains opposants évoquent parfois l’idée de VIe République, mais généralement sans grande conviction. Pourquoi scier la branche sur laquelle on espère s’asseoir un jour ou l’autre ? D’ailleurs, l’opinion dans son ensemble est assez indifférente à cette problématique, et semble se satisfaire du statu quo. On peut se demander si cela n’illustre pas un penchant récurrent pour la monarchie dans ce pays...

   Cet état d’esprit se retrouve à l’échelle locale. Les exécutifs régionaux et départementaux sont peuplés de femmes et d’hommes se pensant souvent providentiels et considérant n’avoir de compte à rendre qu’aux élections suivantes. Beaucoup de maires fonctionnent de façon autocratique, et décident de tout en considérant adjoints et a fortiori conseillers municipaux comme quantité négligeable.  Surtout, bien peu d’entre eux voient l’intérêt d’instaurer un certain degré de démocratie participative, hormis quelques comités de quartiers symboliques. Faire intervenir les citoyens dans la prise de décision municipale ? Pourquoi faire ? Le maire bagnérais actuel le dit à sa façon : "électeurs et élus, chacun à sa place…"

   Mais les compétences municipales sont maintenant limitées puisque nombre d’entre elles ont été confiées aux communautés de communes. Notre maire a moins de pouvoir, en théorie en tout cas, que le président de la CCHB ... L’élection de ce dernier devient alors un moment important. L’enjeu engendre tractations et pressions en tout genre essentiellement sur fond d’ego. En effet la ville de Bagnères a un nombre conséquent de conseillers communautaires – d’où une influence plus importante que n’importe quelle autre commune – mais n’a pas la majorité qui lui permettrait de prendre des décisions seule. Avoir la présidence de la CCHB n’y change rien.

   Pourquoi serait-il donc souhaitable que le maire de Bagnères soit également président de la CCHB ? Evidence pour Rolland Castells : la commune centre n’allait pas laisser échapper un rôle de prestige lui revenant de droit compte tenu de son importance démographique et économique. Discutable pour Jean-Bernard Sempastous, qui n’avait pas revendiqué cette place (échue à Jacques Brune, maire de Baudéan), montrant que Bagnères ne se plaçait pas en position hégémonique et laissait de la place aux communes associées.

   Claude Cazabat renoue avec l’idée d’écraser la concurrence. Epaulé en cela par Sébastien Lacrampe, il désire à tout prix récupérer cette présidence. Qu’en sera-t-il de François Roux ? Une journaliste s'interroge : « va-t-il privilégier l’intérêt de Bagnères en appuyant la candidature de Cazabat ? » 

   Poser ainsi la question, c’est orienter le débat : l’intérêt d’une communauté est l'intérêt des membres qui la constituent. Celui de Bagnères n’est pas de flatter l’ego de son maire en lui permettant d’avoir la présidence mais de faire partie d’une communauté qui fonctionne de façon ouverte et efficace, en s’appuyant sur les contributions de chacun et en respectant les intérêts de tous.

   Voulons-nous rester dans l’idéologie jacobine, en centralisant au maximum, en donnant le plus de pouvoir possible à la commune principale ?

  Selon nous, non ! Nous pensons qu’il faut cesser de raisonner en terme de verticalité, et qu’il est nécessaire de passer progressivement à une répartition des pouvoirs plus horizontale. Il n’est pas sain que la commune centre dispose de tous les pouvoirs et que la CCHB soit une simple chambre d’enregistrement de ses décisions. Bagnères ne doit pas s’ériger en tuteur d’un groupement de communes associées. Pour que les conseillers communautaires des villages s'impliquent dans la gestion de la CCHB, il est indispensable que le président soit l’un d’entre eux. Symbolique réellement communautaire, démocratique, participative et motivante pour les conseillers non Bagnérais, comme on a pu le constater lors de la dernière mandature. Les habitants des villages ont besoin de savoir que leurs représentants sont entendus et impliqués dans les processus de décision.

   Pour la CCHB, se retrouver à nouveau avec un président bagnérais serait une régression.

 


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